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La restauration unique a vécu, tous les restaurants sont multiples

30 Mars 2016 - 4056 vue(s)

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Cela fait quelques temps que nous lisons ou entendons que les barrières tombent les une après les autres entre les différents niveaux, segments, secteurs de la restauration. Sans qu’il soit question de chronologie, l’abolition des frontières s’opère sur trois niveaux : les produits, les circuits et les modes de service.

MIXITE DES CUISINES ET DES PLATS

La fusion food est une éclatante manifestation de la faculté de mêler aujourd’hui des recettes aux origines et ingrédients si différents que personne ne l’avait imaginé hier. Un exemple récent est l’invasion du Poke Bowl hawaïen « à la sauce française » ou, un autre, les plats qui mêlent deux célèbres cuisines, péruvienne et thaï. Plus basique et déjà ancien, toujours en termes de produits, les chefs étoilés qui se sont exercés au hamburger ou en proposent désormais à leur carte ; un produit historiquement symbolique de la malbouffe… Un comble !  

MELANGE DES CIRCUITS

Ensuite on a vu tomber les barrières entre des différents circuits. Les périmètres respectifs des restaurants traditionnels, des cafés et brasseries, de la restauration rapide et du fast casual, des cafétérias et des espaces snacking des grandes surfaces sont plus flous que dans le passé. On peut de plus en plus choisir entre prendre un repas sur un mange debout ou une table basse, au comptoir ou dans la salle, perché sur un tabouret ou vautré dans un sofa. Beaucoup de lieux ont une offre dédoublée, du style restauration rapide au rez-de-chaussée et gastronomique à l’étage. Le commun dénominateur, le plus petit, est que tous proposent une solution repas. Au consommateur de choisir celle qui lui convient le mieux compte tenu du moment et de la circonstance de sa visite.

MULTIPLICATION DES MODES DE SERVICE

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Le corollaire est que, les frontières, autrefois bien délimitées entre les différentes formes de service, s’estompent également. A l’origine chaque restaurant, chaque concept est dédié à une certaine forme de service : à table, au comptoir, en self service, en vente à emporter ou en livraison. Aujourd’hui tous cherchent à ajouter une dimension supplémentaire à leur prestation. Pourquoi ? Eh bien pour développer l’activité et, surtout, pour palier à la baisse de fréquentation.

La question posée est l’intégration d’un nouveau mode de service dans le restaurant qui n’a pas été conçu pour. Inimaginable il y a peu, McDonald’s teste le service à table. Un sacré challenge interne pour faire passer le personnel de service du comptoir à la salle. D’autres restaurants développent la vente à emporter, mais cela pose d’autres problèmes : que fait le client pendant qu’il attend que son plat soit prêt ? Prend-il un verre au bar pour patienter ? Où attend-il ? N’obstrue-t-il pas l’entrée du restaurant, ne gène-t-il pas le passage des serveurs ? La cuisine peut-elle « envoyer » cette commande supplémentaire urgente en plus de celles des clients en salle ? Y a-t-il un packaging adapté au transport ? La réponse à ces questions tout comme la seule solution pour avoir une vente à emporter efficace, est que le restaurant l’ait intégrée dans sa conception avant l’ouverture. Un comptoir spécial, un espace d’attente dédié ou une fenêtre sur le trottoir pour les fast food.

La restauration livrée décolle. Surtout depuis le 13 novembre, hélas. Pour les restaurants et chaînes totalement dédiées à la livraison, il n’y a aucun souci car tout a été pensé pour ce mode de service et ils savent gérer une montée en pression. Les Domino’s Pizza, Speed Burger et consorts voient leur activité augmenter, pas seulement les soirs de matchs de foot. Mais pour les restaurants à service à table c’est un autre challenge, encore plus complexe que celui de la vente à emporter : faut-il assurer cette prestation de façon intégrée ou recourir à un prestataire ? Si la seconde solution est souhaitable - pour une raison d’organisation et de coût - quelle prestataire choisir (certains étant plus positionnés sur la restauration rapide, d’autre plus sur la traditionnelle) ? Quels plats peuvent convenir à la livraison ? Et à quel prix les proposer aux clients une fois déduite la commission de la société de livraison ? La marge du restaurant ne faiblit-elle pas ? Lorsque la commande est arrivée par internet, quid de l’organisation en cuisine ? Et le livreur, où attend-il avec son uniforme voyant et son casque sur la tête, à côté des clients qui prennent un verre au bar ? Et le packaging est-il adapté pour conserver la chaleur et que rien ne s’y répande ?

Dans la plupart des cas, l’extension des modes de service est un compromis risqué qui peut affecter l’activité « historique » du restaurant. Bien entendu, en cette période difficile qui perdure, toute hypothèse permettant de dynamiser l’activité doit être recherchée, envisagée et étudiée. Avec calme et discernement. Un restaurant en création peut intégrer tous les modes de service dans son agencement. Si McDonald’s n’a toujours pas généralisé le service à table, même partiel, c’est que des obstacles subsistent. Si un restaurant traditionnel s’engage à fond simultanément dans la vente à emporter et la livraison, il risque de créer une pagaille incroyable en cuisine, au comptoir et en salle. Il faut tester ces extensions et mesurer la satisfaction des clients utilisant les différents modes par un questionnaire ou via les avis sur Tripadvisor…

Thierry Poupard

www.service-attitude.com

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