Le confinement et le déconfinement en cours, est à géométrie variable selon les pays européens. Grâce à ses antennes européennes, Elan CHD fait un état de la situation, pour snacking.fr dans plusieurs pays à commencer par l’Espagne.
Durement touchée avec plus de 25 000 morts, elle est un des pays européens qui a appliqué le confinement parmi les plus stricts à partir du 14 mars dernier. Seule la livraison à domicile était possible ce qui a boosté les grandes plateformes et notamment la pépite catalane Glovo. L’Espagne autorise, depuis le week-end du 2-3 mai, la vente à emporter avec retrait sur place des commandes. Le 11 mai, le pays va permettre, à nouveau, l’ouverture des terrasses des restaurants, avec la possibilité d’offrir une capacité d’accueil de 30 % du total avant « crise ». Cette phase 1, du déconfinement sera suivie, dans un second temps (annoncé début juin) d’une autorisation d’accueil à l’intérieur des restaurants à hauteur de 30 % à 50 % de la capacité totale, pour permettre une distanciation sociale adaptée.
Au niveau des aides économiques, le pays peine à trouver les bonnes mesures. Le chômage partiel est financé par l’état et interdit les licenciements pendant cette période pour les entreprises ayant recourt à cette mesure couvrant 80 % du salaire net, mais à date il n’y a pas d’autres aides négociées, tout est en discussion et notamment le report des loyers et charges.
Cette situation de réouverture partielle n’est pas une bonne nouvelle pour tous, l’équilibre économique est remis en cause par le poids des charges fixes (dont le loyer versus capacité d’accueil) versus les revenus générés par les terrasses. Pour bon nombre d’acteurs de la restauration, le chiffre d’affaires ne sera pas suffisant, ou il ne permettra pas un volume d’affaires viable. Illustration avec un fait historique à Barcelone. Aujourd’hui plus de 90 % des Chiringuitos (nom donné à ceux qui exploitent les « bars de plage en concession »), ont renoncé pour cette année à la concession des bars de plage, pour cause de non-rentabilité liés aux charges fixes. Le rapport de force est posé avec les concédants. Côté livraison, seule option jusque-là possible, les restaurateurs sont tributaires et étranglés par les agrégateurs avec des taux de commission qui fleurtent avec les 40 % pour le leader Glovo devant Deliveroo, à 35 %, mais des droits d’entrée 2 fois inférieurs à 150 €. Uber Eats, outsider derrière ces 2 concurrents, n’applique pas de droit d’entrée mais une commission de 30 % et 0,2 € de frais fixe qui sont les charges appliquées pour la livraison.
"La restauration hors domicile est un bien commun, l’enjeu des acteurs de la filière est de reconstruire la nouvelle chaîne de valeur ensemble, sans tomber sous la domination des sociétés qui ont la maitrise des datas consommateurs et shoppeurs", Eric Foucaud.
Quelle stratégie adopter pour garder une activité viable ou garder le contact avec ses clients ?
Pour ne pas dépendre totalement des acteurs de la livraison, une des stratégies est de proposer systématiquement au consommateur, depuis son propre site internet le choix de plateforme de livraison pour le rendre acteur dans son acte d’achat. L’enseigne du groupe de Teresa Carles, pionnière de la restauration végétarienne pour tous, propose sur son site internet 3 solutions de plateformes de livraison pour ses points de vente encore en activité pour produire les commandes (3 à Barcelone, 1 à Madrid). Cette activité réduite à 4 lieux de production sur les 12 en temps normal permet de proposer ses spécialités avec une exploitation économiquement viable. Pour offrir un bénéfice attractif à ses clients qui commandent en livraison à domicile, Flax&Kale propose également une offre promotionnelle sur ses produits phares, « ses healthy drinks », cold pressed, gamme de kombuchas fait maison. Remise de 1 euro sur l’ensemble de la gamme.
L’autre stratégie observée par exemple chez Bacoa, chaîne de burger gourmet, née à Barcelone et implantée dans 5 villes du pays, est de proposer sur son site, la livraison comme un nouveau service de l’enseigne. Le choix s’est porté sur 2 plateformes et uniquement disponibles dans une ville au potentiel suffisant. Barcelone en l’occurrence.
Enfin l’enseigne montante du Healthy espagnole, Honest green, positionnée sur le fast-good et récemment implantée à Barcelone, informe sur son site, de son choix de faire reposer totalement sa continuité de service sur la plateforme leader, uniquement dans la ville où sa notoriété et ses clients fidèles sont nombreux. Elle le présente comme une alternative à la fermeture exceptionnelle de ses restaurants. Quid des habitudes prises et des besoins de sécurité sanitaire après confinement.
En conclusion : le salut de la restauration passe, d’une part par l’accompagnement de l’Etat, mais surtout, aussi par les plateformes de livraison quitte à dégrader la rentabilité, du moins sur une période transitoire. Reste à savoir de quelle manière ces dernières vont se montrer « solidaires », sans abuser d’une position dominante et contribuer au nouveau départ de la restauration Hors Domicile en Espagne.