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Où en est-on des revendications des restaurateurs concernant les indemnisations pour pertes d’exploitation ?

8 Juillet 2020 - 3106 vue(s)
L’affaire qui a opposé le restaurateur parisien de La Maison Rostang Stéphane Manigold à AXA au sujet de l’indemnisation des pertes d’exploitations liées à la pandémie de coronavirus aura fait couler beaucoup d’encre. Jusqu’à la finalisation d’un accord à l’amiable annoncé le 23 juin dernier. Dans une tribune pour snacking.fr, l’avocat associé-gérant Rémi de Balmann, du cabinet D, M & D Avocat, revient sur les multiples enseignements à tirer de cet épisode qui constitue un pas important pour les restaurateurs.

Que les restaurateurs – indépendants ou sous enseigne – comptent sur les assureurs pour « jouer le jeu » dans cette période où leur survie peut dépendre d’une indemnité pour pertes d’exploitation est plus que légitime. Et même si beaucoup reste encore à faire, on ne peut que se féliciter que les choses avancent !

« Un mauvais accord vaut mieux qu’un bon procès », assure l’adage populaire. Avec panache et brio, Stéphane Manigold (La Maison Rostang, Substance, Contraste, Le Bistrot d’à côté Flaubert) a cependant démontré qu’un « bon accord » est bien préférable encore à un « mauvais accord » … quitte à devoir engager un procès ! Car ce restaurateur a fait « plier » AXA qui lui refusait l’indemnisation des pertes d’exploitation subies sur ses quatre établissements alors même que la police d’assurances prévoyait un arrêt d’activité découlant d’une « fermeture administrative ». Démontrant par là-même que sa position initiale était plus que discutable, AXA a fini par préférer conclure un accord avec Stéphane Manigold plutôt que de continuer le procès. AXA – prudemment – a préféré renoncer à l’appel qu’elle avait introduit à l’encontre de l’ordonnance de référé rendue par le Président du Tribunal de Commerce de Paris et qui l’avait condamnée à verser une provision à valoir sur les pertes d’exploitation. Le 23 juin dernier, Stéphane Manigold a ainsi annoncé par communiqué avoir scellé un protocole transactionnel mettant un terme au litige, se félicitant au passage « qu’Axa ait entendu mon appel à engager le dialogue et à proposer une solution à l’ensemble des restaurateurs qui détenaient les mêmes contrats que les miens ». 

Plus que jamais les assureurs (ou certains d’entre eux) doivent cesser d’alléguer qu’une pandémie ne serait – par nature – pas assurable. Si des polices d’assurance excluent expressément la pandémie, n’est-ce pas précisément parce qu’il s’agit d’un événement pouvant entrer dans la couverture des risques « pertes d’exploitation » ? Prenant en réalité position sur le débat de fond, le Président du Tribunal de Commerce de Paris avait d’ailleurs malicieusement pris soin de relever, dans son ordonnance du 22 mai, que l’assureur « ne s’appuie sur aucune disposition légale d’ordre public mentionnant le caractère inassurable d’une conséquence d’une pandémie », relevant en outre qu’il aurait incombé à AXA « d’exclure conventionnellement ce risque » !... Et l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR) vient, elle-même, de rendre un rapport le 23 juin indiquant que 3 % des assurés disposaient de contrats couvrant explicitement la pandémie et 4 % de contrats contenant des clauses « ne permettant pas de conclure avec certitude à une absence de garantie ». Et d’appeler les assureurs à passer les provisions nécessaires et à exécuter sans tergiverser leurs obligations, rappel étant fait que « dans le doute, le contrat d’adhésion s’interprète contre celui qui l’a proposé » (article 1190 du Code Civil).

Quant à la grande majorité des assurés non couverts (aujourd’hui), Bruno Le Maire – avant d’être reconduit ce lundi dans ses fonctions de Ministre de l’Economie et (désormais) de la Relance –  avait déclaré s’atteler à la rédaction d’un projet de loi portant « création, d’une assurance des entreprises en cas de crise sanitaire ». Espérons et même gageons que ce projet restera une priorité et sera « bouclé » d’ici à la fin de l’année ! A suivre donc, sur le front judiciaire et législatif…

Rémi de Balmann

 

 

 

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