Congrès du Snacking 2022 : pourquoi la restauration est-elle contrainte d’effectuer un grand remix ?
Communauté

Congrès du Snacking 2022 : pourquoi la restauration est-elle contrainte d’effectuer un grand remix ?

9 Juin 2022 - 5112 vue(s)
En 2022 le consommateur n’a jamais eu autant de choix à sa disposition qu’actuellement et il peut trouver l’offre alimentaire qui lui convient en fonction de ses occasions de consommation. Dans ce contexte, faut-il garder l’option d’un point de vente food de plus en plus hybride qui réunit la consommation sur place, la livraison alimentaire, le click and collect et la VAE ? Comment réaliser le grand remix de sa carte pour maintenir ses marges à l’heure où l’inflation des matières premières est galopante et l’offre multiple ? Comment réagir alors que la crise pandémique s’éloigne et que la guerre en Ukraine apporte sa dose d’incertitudes ? Pour trouver les réponses à ces questions, il fallait se rendre au 12e Congrès du Snacking qui s’est tenu le mardi 7 juin à Paris au Pavillon Royal. L’occasion, pour tout l’écosystème de la restauration, de connaître avant tout le monde les tendances de consommation qui vont dicter un été que nous espérons tous sous de meilleurs auspices afin de préparer une rentrée qui s’annonce plus que jamais brûlante à tous points de vue…

Pour comprendre le phénomène de la consommation alimentaire, et de la mise en place d’une stratégie cross canal pour les CHR en 2022, il faut tout d’abord se mettre dans la peau du consommateur. Il peut tout à fait commencer sa journée en se rendant dans un point de vente le midi pour son déjeuner et déguster le nouveau produit du mois, puis commander son plat préféré le soir qu’il se fera livrer à son domicile en regardant une série via Deliveroo en recherchant le nom de son restaurant préféré ou simplement en naviguant au gré de ses envies et humeurs sur la plateforme. Le lendemain, il prendra son café en take away dans une enseigne avant de se rendre au travail, puis il se rendra au drive le plus proche de son lieu de rendez-vous professionnel pour retirer une commande qu’il aura passée depuis une application. Au travers de cet exercice tout à fait réaliste, le client utilise tous les canaux de distribution qui sont mis à sa disposition afin d’entretenir une relation commerciale. Si bien que les barrières entre physique et digital disparaissent. L’expérience client l’emporte en cassant les silos entre les canaux de distribution, poussée par le maintien du télétravail en entreprise qui devrait atteindre 2 à 3 jours par semaine d’ici 2025, mais aussi le contexte géopolitique et l’inflation galopante que nous connaissons actuellement. Après deux années de pandémie, de nouveaux défis s’annoncent pour les CHR selon l’avis des nombreux experts pésents au 12e Congrès du Snacking, organisé par le magazine France Snacking, et qui ont partagé leur vision du marché avec les 270 professionnes présents.

Reconquérir le consommateur au déjeuner en CHR

Si la restauration rapide progresse toujours, poussée par la croissance du segment fast casual, le consommateur profite du meilleur de toutes les offres dont il dispose. « Avec une progression de 10 % encore cette année, la restauration rapide s’en sort beaucoup mieux que la restauration traditionnelle à table, réussissant le pari presque insensé de représenter plus de 70 % des actes de consommation en RHD en 2022 », explique Maria Bertoch du cabinet The NPD group. « Elle réussit même à lui prendre encore des parts de marché. Plus fonctionnelle, plus économique, entre le fast-food et la restauration assise, elle permet au consommateur de se socialiser quand il le souhaite tout en bénéficiant de tous les canaux de distribution à sa disposition. Nous expliquons cette symbolique par les 3 D : Drive, Delivery et Digital ». Si bien que la livraison persiste et signe une progression fulgurante en 2022. Et ce même depuis la réouverture des restaurants avec une croissance de 85 % en 2021 et un nouveau bond de 35 % au premier trimestre 2022. 

Les 3 D (Drive, Delivery, Digital) progressent après le Covid en restauration. Le drive a progressé le plus en Europe (+49 %) où il était peu présent, la digitalisation de la restauration s'est accentuée en Amérique du Nord grâce au marketing digital et à la gesion des données via le back office tout comme la livraison qui progresse le plus aux USA et en Europe (+129 et + 87 % respectivement).The NPD Group.

Ce constat est également partagé par Lydia Rabine et Laurence Deschemin chez Kantar Worldpanel : « Le moment du déjeuner est en net recul en restauration hors domicile et profite aux restaurants de la rapide et au retail qui sont en lutte perpétuelle pour convaincre le consommateur qui recherche de plus en plus de solutions accessibles tout en voulant continuer à se faire plaisir, compte tenu de la contraction économique qui s’opère. Les consommateurs répondent à différentes injonctions dont celle de faire des économies alors que tous les postes de dépenses augmentent au sein du foyer. Si la livraison s’installe dans le panorama, le fait-maison et les solutions pratiques et ultra-fonctionnelles (convenience) l’emportent sur le temps de préparation des repas. Les meal kits, le quick commerce et les solutions toutes faites connaissent de réelles progressions significatives et sont de nouvelles pistes à explorer par tous les acteurs ». Chez Hippopotamus, historiquement positionnée sur la restauration à table, l'activité livraison est aujourd'hui partie prenante du modèle économique des restaurants, elle qui pèse 8 % de l'activité en moyenne contre seulement 3 % en 2019 témoigne son DG Philippe Héry. Les agrégateurs, comme Deliveroo qui était à nouveau présent au Congrès du Snacking, confirment cet attrait pour le livré : « Avec 26 000 restaurants référencés sur notre plateforme, notre attractivité auprès des restaurateurs, de nos partenaires livreurs et des consommateurs reste très forte en 2022, même après la réouverture des restaurants et l’arrivée des beaux jours. Le consommateur reste très impliqué auprès de ses marques préférées et il peut aussi trouver des solutions de livraisons de courses qui sont complémentaires à une offre food. On le voit ainsi compléter ses achats avec des produits surgelés par exemple, comme avec Picard dont nous détenons le partenariat exclusif », analyse Kevin Mauffrey, le Sales Manager France de la plateforme. Cela laisse entrevoir une hyper adaptabilité des opérateurs présents sur ces plateformes et rappelle l’importance du menu engineering. La société Deliverect apparaît d'ailleurs comme l'un des grands spécialistes avec une croissance sur les 4 continents. « Un restaurateur peut tout à fait établir une offre sur une ville et sur la plateforme de son choix afin de coller à un moment précis de consommation. Il peut adapter son tarif, sa photo instantanément et suivre l’évolution de ses performances en direct depuis son dashboard », explique Jérôme Loredo, son cofondateur. Et ce alors que la maîtrise de la data devient fondamentale pour mieux performer et toujours adapter son offre à l’instant T.

  • Maria Bertoch, The NPD Group, délivre son étude au Congrès du Snacking

    Maria Bertoch, The NPD Group, délivre son étude au Congrès du Snacking

  • La rédaction de France Snacking ouvre la 12e édition du Congrès 2022

    La rédaction de France Snacking ouvre la 12e édition du Congrès 2022

  • Philippe Héry - Hippopotamus, Thierry Veil - Bagelstein, Feuillette

    Philippe Héry - Hippopotamus, Thierry Veil - Bagelstein, Feuillette

  • Quels Nouveaux défis pour la Supply Chain ?

    Quels Nouveaux défis pour la Supply Chain ?

  • Comment mettre en place une stratégie multicanale en CHR ?

    Comment mettre en place une stratégie multicanale en CHR ?

  • Speed dating concept : les nouveaux concepts gagnants hybrides en CHR

    Speed dating concept : les nouveaux concepts gagnants hybrides en CHR

  • Emballage, recyclage, réemploi : vers la fin du modèle à usage unique?

    Emballage, recyclage, réemploi : vers la fin du modèle à usage unique?

Se concentrer sur son menu engineering pour optimiser toutes ses ressources et sur tous les canaux de distribution

Face à un consommateur de plus en plus volatile et qui recherche en premier lieu les promotions, il convient donc d’optimiser ses offres et ses menus en fonction des nombreux instants de consommation pour s'adapter à la tendance du homing. L’enjeu est crucial pour les entrepreneurs de la food, qui, selon David Vidal du cabinet Simon-Kucher & Partners, manquent encore de méthodologie afin de repenser le pricing de leur offre. Le défi est d'autant plus stratégique que l’inflation et la pénurie de matières premières bousculent le marché. « Ce moment d’inflation doit être un moment de réflexion pour comprendre en quoi une politique de prix réussie constitue une opportunité de succès pour les enseignes. En résonnant sur une marge exprimée en valeur et non en pourcentage pour chaque produit, le restaurateur peut rester attractif aux yeux du consommateur en adoptant une cohérence tarifaire acceptable par celui-ci », ajoute David Vidal. Les restaurateurs doivent bâtir des offres plus intelligentes et basées sur le coup de cœur du consommateur, sur tous les circuits de distribution.

 

« Au restaurant, l’offre à partager et cocktails sont de nouvelles manières d’aller chercher le consommateur. Elles peuvent très bien se retrouver en pairing en livraison et sur d’autres circuits de distribution. L’offre de nuit est aussi une piste à explorer dans les agglomérations avec la réouverture des bars de nuit. En boulangerie aussi, qui consitue l'un des circuits phares du snacking, avoir un étal différent en fonction des moments de consommation de la journée est devenu essentiel », insiste Nicolas Nouchi de CHD Expert by Datassential. Avant de renchérir : « Les restaurateurs doivent apprendre à donner un peu pour recevoir beaucoup dans leurs offres en mixant les produits à faible marge avec d’autres plus fortes, mais aussi via leurs programmes de fidélité. Le cash back est aussi un levier intéressant à actionner en poussant le consommateur à revenir au restaurant parce qu’il y trouvera un intérêt ». L'ajout de frites au sein du mix produit aura ainsi permis à Thierry Veil, de Bagelstein de booster le panier moyen, passé de 9,70 € à 10,80 €. « Nous consolidons alors nos marges au passage tout en faisant plaisir à nos consommateurs ». « Les consommateurs sont aussi en demande de plats cuisinés à emporter et nous allons même amplifier les horaires de service en soirée sur certains sites pour satisfaire toute la demande », souligne Jean-François Feuillette, fondateur du réseau de boulangeries éponyme. Et pour Jean Valfort, du Groupe Panorama, qui a créé Devor en 2018, relever le défi du pricing peut passer par le lancement de marques virtuelles en résolvant la problématique des volumes tant recherchés en cette période inflationniste. « Et si l’offre ne trouve pas sa clientèle, il est toujours possible de l’interrompre au bout de quelques semaines sans conséquences sur l’image du restaurateur. » précise-t-il.

S’appuyer sur ses fournisseurs et distributeurs pour faire face à la pénurie de matières premières et de personnel

Alors que la moitié de l’offre est concernée par les pénuries persistantes, la filière s’organise pour répondre aux inquiétudes croissantes des restaurateurs. « C’est la moitié de l’offre qui est aujourd’hui directement impactée par les pénuries alors que 15 000 créations d’entreprises en restauration rapide ont été enregistrées les deux années précédentes avec une demande croissante en produits d’assemblage et en packagings », explique Daniel Bataille de METRO France. Si le secteur a vu beaucoup d’innovations émerger cette année, ce sont les services qui se développent le plus chez les fournisseurs explique Blandine Daugenet, directrice marketing EMEA chez Bridor, le spécialiste des produits de boulangerie et viennoiserie. Car les problématiques sont multiples pour les entrepreneurs de la food. Ainsi, outre la hausse et la pénurie des matières premières, celle du personnel n’est toujours pas résolue. « Ce qui nous engage à davantage d’accompagnement et de proximité avec les professionnels du secteur », relate Thomas Beauchart, Directeur Grands Comptes de l'équipementier Enodis. Ainsi, « face à l’hybridation des canaux de vente, le marché se transforme et tire son épingle du jeu en s’appuyant sur toutes les ressources de la supply chain alors que la restauration rapide s’appuie sur une cuisine d’assemblage et connaît des hausses encore plus conséquentes allant bien au-delà des 10 % », résume Mickaël Ballay, directeur associé du cabinet Food Service Vision.

Réussir sa transition écologique en restauration

Malgré la volonté d’agir, les entrepreneurs ont le sentiment que les business model des entreprises sont peu compatibles avec la conduite d’un marketing responsable alors que les défis sont multiples… A l’heure où les enjeux environnementaux et sociaux sont cruciaux pour pérenniser les activités humaines, et dans un contexte où le pouvoir d’achat et l’approvisionnement des matières premières restent difficiles, comment les acteurs du foodservice envisagent-ils le passage à la loi Agec en janvier 2023 ? « Les acteurs devront prendre les devants sans tarder en mettant un calendrier de mise en place avant la fin de l’été pour encore avoir le choix de leur solution d’externalisation de la consigne. Et de rappeler que la réalisation d’un POC (Proof Of Concept) s’avère indispensable avant de l’étendre à l’ensemble du réseau », justifie Marc Rocagel, CEO d’Options Solutions. « C’est une nouvelle opportunité pour le restaurateur de venir avec une offre vertueuse et porteuse de sens en faveur de l’environnement alors que les consommateurs sont en attente de solutions pérennes et écologiques, à la condition d’adapter sa communication », observe Laurent Lemarchand, dirigeant associé du spécialiste des solutions de transport, d'hygiène et d'emballage, MbPack. Même écho du côté de Rodolphe Nassiet, franchisé dirigeant au sein du réseau Le Fournil de Pierre, qui constate que son activité snacking est de plus en plus présente (50 % du CA). « Nous proposons des salades, des plats traiteur à emporter chez soi en soirée et une offre multiple nomade tout en restant dans notre thématique boulangère ». Et il est en train de tester un sysème d'emballage consigné. « Pour réussir ce pari de la consigne, il faut déjà être convaincu soi-même par la démarche du réemploi, afin de bien communiquer. Nos premiers essais sont encourageants avec un taux de prise de 10 à 15 % en fonction des établissements ». De quoi donc donner des idées à d'autres qui souhaiteront eux-aussi s'orienter sur la piste du grand Remix...

Le 12e Congrès du Snacking est organisé en partenariat avec Bridor, Crisalid, Deliverect, Deliveroo France, Enodis, MbPack, Metro France, Options Solutions et Pepsico France, et les précieux soutiens de la FEB, Geco Food Service, Leaders Club France, Sandwich & Snack Show, Parizza, Elles Sont Food et le Snarr que nous remercions chaleureusement comme tous les experts et les intervenants qui ont contribué au succès de cette édition. 10 concepts gagnants étaient également présents pour venir pitcher leur enseigne et symboliser ce grand Remix du hors-domicile : Bolk, Franks Hot Dog, Gomu, Home Donuts, Italian Queen, Jimmy's Street Food, La Criée, OFC, Papo, Sapid

Si cet article vous a été utile, et nous l’espérons, n’oubliez pas de le commenter et de le partager avec votre communauté !

Pascal Perriot Web Manager Suivez Pascal Perriot sur @perriot_pascal
Commentaires (0)
Les concepts Snacking
décrypter

Dans la même thématique