Adlane Draou
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Comment Adlane Draou, avec Gong cha et son groupe Mad Vision, veut conquérir la France, puis l’Europe

19 Novembre 2024 - 1879 vue(s)
Entre ses débuts en Belgique, une découverte déterminante de l’entrepreneuriat aux États-Unis, et une aventure formatrice au Congo, cet entrepreneur belge a su transformer ses expériences en succès. Aujourd’hui, il est à la tête de MAD Vision, un groupe qui réalise 12,5 M€ de CA, compte déployer des enseignes de restauration rapide en Europe et au-delà avec, comme tête de pont, la marque Gong cha dont il a pris la master franchise sur plusieurs pays ou encore O’Tacos. Retour sur un parcours inspirant et une ambition sans limites.

Vous avez grandi entre Mons en Belgique et la région parisienne. Comment ces influences ont-elles marqué votre parcours entrepreneurial ?

J’ai grandi à Mons, une ville industrielle d’environ 100 000 habitants, profondément marquée par son passé minier. La réussite, pour beaucoup, signifiait faire de bonnes études et décrocher un travail stable, souvent dans les grandes entreprises ou en usine. C’est un modèle dans lequel je ne me reconnaissais pas, car il laissait peu de place à l’imagination ou à l’initiative personnelle. La France, et plus particulièrement Lille, Valenciennes et Paris, où j’ai passé beaucoup de temps pendant mon enfance et auprès d’une partie de ma famille, m’a offert une perspective différente. Cela m’a permis de découvrir des environnements plus dynamiques, où les gens osaient davantage créer. Mais le vrai tournant a eu lieu à 17 ans, lorsque j’ai eu la chance de partir aux États-Unis. Là-bas, j’ai véritablement pris une claque mentale. J’ai découvert l’entrepreneuriat dans sa forme la plus accessible : des personnes ordinaires qui montaient de petites entreprises et réussissaient grâce à leur travail acharné. Cela m’a libéré d’un certain carcan et démontré que tout était possible, avec la force du travail et des convictions. Je suis rentré en Belgique, ai passé mon bac, mon master 2 en droit des affaires avant de repartir au Congo pour entreprendre.

C’est au Congo que vous avez ensuite choisi de vous lancer. Pourquoi ce choix et que retenez-vous de cette expérience ?

Le Congo représentait un territoire d’opportunités gigantesques, au regard des relations particulière entre ce pays et la Belgique. Durant mes études, j’avais fait un stage dans une entreprise là-bas, et j’avais été frappé par le potentiel du pays. Kinshasa, avec ses 17 millions d’habitants, manquait cruellement d’infrastructures, mais regorgeait de besoins essentiels : alimentation, transport, logement, etc. À l’époque, je savais que rester en Belgique limiterait mes ambitions, alors j’ai décidé de tenter l’aventure au Congo. Nous avons commencé avec l’import-export, en nous appuyant sur les réseaux que j’avais construits lors de mon stage. Mais ce modèle avait ses limites face aux géants du secteur. Rapidement, nous avons pivoté vers le transport. Notre projet de taxis collectifs a connu des débuts difficiles avant de s’imposer. Ensuite, nous nous sommes diversifiés dans l’exploitation du bois, une ressource abondante au Congo mais sous-exploitée à cause de la logistique. Cela m’a appris à naviguer dans un environnement complexe, entre gouvernance défaillante et défis logistiques extrêmes. Ces années au Congo ont été formatrices : elles m’ont appris à gérer des crises, à m’adapter rapidement et à transformer les contraintes en opportunités.

Pourquoi avoir décidé de revenir en Belgique et de vous tourner vers la restauration rapide ?

Après plusieurs années au Congo, j’ai senti qu’il était temps de rentrer en Europe, principalement pour des raisons personnelles et familiale. Nous sommes fin 2017. En revenant, je voulais me lancer dans un domaine avec un potentiel de développement rapide. C’est là que j’ai découvert O’Tacos, une chaîne en pleine expansion. La restauration rapide m’a attiré non pas par passion pour le produit, mais parce qu’elle permet de construire un modèle scalable, avec des processus bien rodés qui peuvent être répliqués à grande échelle. J’ai commencé en tant que franchisé après avoir racheté le restaurant bruxellois alors que la chaîne n’était pas encore ce qu’elle représente aujourd’hui. J’ai ensuite ouvert plusieurs points de vente en Belgique. J’ai en 8 aujourd’hui. Cela m’a permis d’apprendre les bases de la gestion d’un réseau, tout en consolidant mes compétences en stratégie d’expansion. Après avoir tenté l’aventure Chick & Cheez en 2020 aux côtés de Kharis Capital auprès de qui j’ai beaucoup appris dans la création de marque,  j’ai voulu aller plus loin et viser des marques internationales, capables de toucher plus rapidement des marchés plus vastes.

Vous êtes aujourd’hui le master-franchisé de Gong Cha. Pourquoi avoir choisi cette marque et ce marché ?

Gong Cha s’est imposé comme une évidence pour moi avec ses 2 700 points de vente au monde dont 980 en Corée, ses 400 M€ de CA et sa croissance ultra rapide à l’image des 500 points de vente ouverts aux US en moins de 3 ans. Le marché du bubble tea est en plein essor, porté par un basculement culturel vers l’Asie. Nous sommes dans une époque où le soft power asiatique gagne du terrain, que ce soit à travers la K-pop, les séries coréennes ou des habitudes de consommation comme le sushi ou le bubble tea. Parmi les marques que nous avons étudiées, outre ma passion pour l’Asie et le Japon en particulier, Gong Cha s’est distingué pour trois raisons principales. D’abord, la qualité du produit : leurs thés sont infusés sur place toutes les quatre heures, avec des ingrédients premiums issus de leurs propres fermes au Vietnam. Ensuite, leur vision internationale : le top management vient d’entreprises comme McDonald’s et Five Guys, ce qui apporte une rigueur occidentale dans leur stratégie. Enfin, les investissements nécessaires pour ouvrir un point de vente sont relativement faibles, ce qui facilite le développement rapide. En deux ans, nous avons ouvert 23 points de vente, principalement en France (10 adresses depuis mai 2023 dont 8 cette année) et en Belgique. Notre ambition est de doubler ce chiffre d’ici 2025 et de faire de Gong Cha une référence incontournable en Europe. Pour nous adapter au marché français, nous avons quelque peu ajusté le modèle de ce tea shop où l’on peut d’abord déguster 3 types de thés dans les règles de l’art (noir, vert et Oolong), chauds ou froids et avec ou sans bille de tapioca ou de sirop, et sommes en train de muscler l’offre food autour d’un snacking sucré de type mochi, cheese cake macha et bientôt Sando.

Gong cha

Quelle est la stratégie de développement de votre groupe, MAD Vision ? Vous vous définissez comme un serial entrepreneur ?

À court terme, nous voulons consolider notre présence dans les pays où nous sommes déjà implantés, notamment en France, en Belgique et au Maroc. L’Espagne sera notre prochaine grande étape. À plus long terme, nous envisageons d’acquérir des enseignes pour les développer sous notre propre contrôle. Nous avons déjà une expérience solide avec Gong cha, mais notre objectif est d’aller plus loin en devenant propriétaires de marques. Cela nous permettra de contrôler toute la chaîne de valeur, de la création à la gestion du réseau. Nous sommes également en discussions pour une acquisition majeure qui pourrait changer la dimension de notre groupe. Un rachat qui serait assorti d’une grosse levée de fonds qui viendrait compléter les 2,2 M€ levés en 2022. En parallèle, nous continuons à structurer notre réseau de franchisés et à attirer des partenaires et des investisseurs stratégiques pour soutenir notre croissance. L’objectif est clair : atteindre 1md de chiffre d’affaires sous enseigne dans les cinq prochaines années.

Paul Fedèle Rédacteur en chef France Snacking Retrouvez Paul Fedèle sur Linkedin
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