Les Burgers de Papa - Yves Hecker
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#snackingconnexion. 'La livraison dépendance' fera partie du modèle, selon Yves Hecker - Les Burgers de Papa

3 Novembre 2020 - 4416 vue(s)
Avec 38 restaurants dans le réseau dont 9 ouverts ouverts depuis le début de l'année auxquels s'ajouteront Caen le 18 novembre et Marseille le 2 décembre, la chaîne Les Burgers de Papa a poursuivi sur sa lancée. Elle devrait finir 2020 avec un CA de 22,5 M€ contre 24 M€ prévus. Yves Hecker, son président, réagit pour snacking.fr à ce nouveau confinement, fait le point sur les derniers mois écoulés et nous livre sa stratégie pour les semaines à venir.

Comment la chaîne est sortie du 1er confinement et en quoi cette crise a changé votre business model ?

Plus forte incontestablement. Notre priorité, outre la santé de nos collaborateurs et franchisés, a été de renforcer nos liens avec nos franchisés et de ce point de vue, nous pouvons nous féliciter d'avoir été à la hauteur de l'enjeu. Entre mi-mars et le 2 juin (date de réouverture des restaurants au public) nous avons eu près de 90 % du parc de restaurants ouverts, qui opéraient essentiellement en livraison et en vente à emporter. Les résultats ont été spectaculaires dans certaines villes avec un volume de livraison de + 300 % sur la période de confinement, ce qui nous a permis d'acquérir de nouveaux clients qui ont continué à se faire livrer tout au long de l'été et encore plus depuis la rentrée. Les opérateurs de livraison ont été unanimes à notre propos : nous avons été exemplaires sur la période, si bien que le volume d'affaires des Burgers de Papa, sur la plus forte semaine de mai 2020, a représenté près de 70 % du segment du burger gourmet à l'échelle nationale. Quand certains préféraient fermer en attendant que l'orage passe, nous étions sur le terrain à satisfaire nos clients et assurer la pérennité de notre réseau. Notre rôle de franchiseur partenaire et solidaire de son réseau, a également pris tout son sens, puisque nous avons annulé les redevances de royalties en mars, et les avons réduites en avril, mai et juin. Un effort de près de 100 000 € qui a permis à nos franchisés de maintenir leur activité avec un poids financier en moins. 



Le canal de la livraison n'a fait que progresser depuis 5 ans au détriment de la vente sur place. Cet état de fait nous l'avions déjà intégré avant la crise et avons revu notre stratégie d'implantation en pesant toujours très fortement le poids de l'acquisition des fonds de commerce ou les valeurs locatives de ces derniers. Si la ritournelle de "l'emplacement, l'emplacement, l'emplacement" est toujours vraie pour la restauration traditionnelle, pour ce qui concerne la rapide, à quoi bon investir des centaines de milliers d'euros dans des fonds de commerce bien placés qui réaliseront de fait plus de la moitié de leur chiffre d'affaires en livraison ? Revoir les points morts de nos restaurants à la baisse est une priorité, et ça passera par des acquisitions mieux senties, des loyers âprement négociés, mais en aucun cas par un rabotage de la qualité de nos produits.

Quels est le point de transformation majeur de la marque, de son offre et êtes-vous obligé de vous réinventer ?

Nous avons mis un coup d'accélérateur sur le développement des bornes tactiles en restaurant et en avons installées sur 3 sites. Elles feront partie du paysage dorénavant et sont intégrées à toutes nos nouvelles implantations. Outre l'importante hausse du ticket moyen, elles améliorent le flux, réduisent la concentration de clients en caisse et limitent (malheureusement) les interactions sociales. Dès mars, nous avons également repris les plans d'aménagement des restaurants en cours et avons réduit le nombre de places au profit d'espaces plus intimisés et de circulations plus larges, toujours dans l'optique de rassurer nos clients. Le retour de ces derniers sur place s'avère difficile, nos restaurants étant souvent petits. Sacrifier de l'espace pour leur offrir un environnement moins concentré nous semble couler sous le sens.

Comment avez-vous vécu l’annonce de ce 2e confinement ? Et vos décisions post-annonce ? 

Résignés. Je pense que les livres d'histoires raconteront cette période mieux que nous autres contemporains. Je fais confiance à nos gouvernants pour préserver l'intérêt général et la santé des Français en ces périodes compliquées. Pas de place pour les discussions d'épidémiologistes de comptoir, appliquons les règles mêmes si elles semblent souvent confuses. On ne peut pas nier que la restauration et les bars sont par définition des lieux de brassage et de rassemblement qui accélèrent la propagation du virus, dont acte. Nous avons tenu une réunion en visio avec les cadres de l'entreprise dès jeudi soir. Nous avons tiré des enseignements forts du premier confinement et avons remis en route les bonnes vieilles recettes qui nous ont permis de rester ouverts et de maintenir un niveau de chiffre d'affaires acceptable : ouvrir et fermer plus tôt en soirée, mettre en place un protocole de retrait des commandes livreurs strict et la mise en avant sur les réseaux sociaux et dans nos newsletters du click & collect.

Cette nouvelle fermeture a-t-elle ou va-t-elle entraîner des changements stratégiques majeurs, si oui lesquels ? 

Elle nous conforte dans notre idée que la "livraison dépendance" est un sujet à intégrer durablement dans notre modèle. Dire que le marché de la livraison de repas à domicile sera multiplié par 5 dans 5 ans, doit d'autant plus nous amener à nous interroger sur cet état de fait et cette mutation des comportements avec laquelle il va falloir composer. Je pense qu'il va falloir utiliser au mieux les outils marketing que nous proposent les plateformes de livraison pour continuer à doper ce canal de vente. Dégrader intelligemment sa marge en jouant sur des combinaisons de prix entre articles qui font grimper le ticket moyen est une des solutions. Nous avons lancé un atelier depuis 2 mois sur ce sujet, les résultats sont sans appel. Comme dans la grande distribution : il vaut mieux payer son emplacement en tête de gondole au prix fort que de rester en queue de rayon, coincé entre deux concurrents.

Quel tableau dressez-vous pour les mois à venir pour la restauration en général et votre segment en particulier ?

Les perspectives sont bonnes, et ce n'est pas un excès d'optimisme de ma part. Nous aurons ouvert 11 restaurants en 2020 et en avons presque déjà signés autant pour 2021. Nous sommes plus que jamais le deuxième acteur français sur le segment concurrentiel du burger gourmet. Nous avons de la croissance dans presque tous nos restaurants malgré cette crise sanitaire, car nous avons su remettre à plat le modèle et chercher les clients là où ils sont, c'est-à-dire dans leur canapé, le masque sur le nez ! Nous ambitionnions les 24 M€ de chiffre d'affaires pour cette année, et atteindrons malgré tout les 22,5 M€ au rythme où vont les choses. Un moindre mal... Je suis néanmoins très inquiet pour le secteur de restauration traditionnelle dont la richesse et la valeur patrimoniale me sont chères. Là où nous sommes agiles et arrivons à nous accommoder tant bien que mal du contexte, les restaurants traditionnels sont démunis et on ne leur offre pas la possibilité de limiter la casse si ce n'est à coup d'aides qui sont de l'ordre du sparadrap sur une jambe de bois, rien de plus. N'aurait-on pas pu faire confiance à ces restaurateurs qui ont joué le jeu, réduit le nombre de places et mis en place des protocoles stricts ? Certains auraient pu rester ouverts avec des contraintes plus fortes encore, ne serait que pour payer leurs charges et garder le bateau un tant soit peu à flot. Je m'inquiète également du second effet PGE qui allourdiront des bateaux déjà bien lourds au redémarrage. Que dire d'une éventuelle hausse de la TVA et des cotisations en tous genres ? Il faudra maintenir nos niveaux de marge, et je l'espère, sans devoir passer par la case de la hausse des prix.

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