Vous avez dit atypique ? « ‘Extra-ordinaire’ au sens propre du mot » pour reprendre les termes du directeur général de Délifrance, Robert O’Boyle, lors de la présentation officielle de la toute nouvelle ligne de confection de produits de boulangerie surgelés, à la fois sucrés et salés. Tant la démarche initiée par la filiale du groupe Vivescia, qui produit chaque année plus de 2 milliards de viennoiseries pour un chiffre d’affaires avoisinant les 900 M€ (dont 80 % à l’international), apparaîtrait presque « hors du temps », rompant avec les process de fabrication ultra-automatisés. La genèse du projet, qui aura fédéré durant deux ans toutes les strates de l’entreprise (direction, recherche et développement, marketing, commerce, production…), remonte en fait à une étude européenne initiée avec Food Service Vision auprès de ses clients du hors-domicile et des consommateurs. « Chez les professionnels ressortaient alors des attentes claires en matière de différenciation et de valorisation de leur offre », se souvient la directrice Marketing et R&D, Valérie Dupuis. « Et du côté des consommateurs, le désir d’expérience est une clé avec une grande importance donnée au plaisir, visuel comme gustatif ». Fort de ce constat, restait alors à se libérer des contraintes usuelles de la production de boulangerie industrielle pour parvenir à casser les codes et « aller au-delà des standards habituels ».
Ce fut en tout cas l’idée directrice de cette démarche « Extra-Odinary » dans laquelle Délifrance, qui compte 14 sites de production au total dont 7 dans l’Hexagone, a déjà investi plus de 2,5 millions d’euros. Pas moins de 800 essais labos et tests industriels auront ainsi été nécessaires depuis l’usine de Landévant, dans le Morbihan, afin d’aboutir à l’expérience recherchée. « Le projet de départ était inédit, ambitieux et incroyablement motivant. Le brief, c’est qu’il n’y avait pas de brief. La règle, c’est qu’il n’y avait pas de règle. », s’en amuse Guillaume Depoorter, le responsable R&D viennoiserie de l’entreprise, qui a trouvé là un sacré terrain de jeu pour libérer les forces créatives de ses équipes. « Nous sommes souvent tiraillés entre création et contraintes industrielles, ce qui parfois nous bride. Ici, nous avons cherché à balayer ces contraintes avec l’ambition de créer une collection haute couture plutôt que ‘prêt-à-porter’, rapprochant la viennoiserie de la pâtisserie » ». La première étape fut la mise au point d’une pâte signature, à la grande qualité de feuilletage, et aujourd’hui commune à 5 des 6 produits de la gamme qui seront lancés en 2024. Travaillée avec de longs temps de repos (minimum 16 heures), elle ouvrait alors la voie à la confection de formes originales et complexes : tressées, enroulées, nouées… Pour ce faire, et c’est bien là toute l’originalité de cette production, la réintégration de l’intervention humaine et de gestes manuels à divers moments du processus de fabrication auront permis de relever encore le niveau d’exigence. Et d'innover dans l'optique de se rapprocher au plus près d’un rendu artisan. Cette nouvelle ligne de Landévant (la 3e que compte le site), outil hybride semi manuel-semi industriel conçu ad-hoc par Délifrance, fait ainsi intervenir 25 à 30 personnes selon les produits confectionnés, dont 8 à 10 pour la seule étape du façonnage. « Le respect des temps, de repos notamment, est ici primordial pour la qualité des produits. Nous sommes donc loin des standards de la cadence et de la haute-productivité mais sur des productions de petite série », indique le directeur général Robert O’Boyle, qui précise que cette ligne a été pensée de manière flexible.
La ligne de Landévant sera donc probablement amenée à évoluer, au travers de nouveaux investissements, pour s’autoriser à imaginer d’autres solutions prémiums pour ses clients. Parmi les cibles visées en priorité par Délifrance, l’hôtellerie premium et la consommation « on-the-go » au sens large. « Le snacking sucré comme salé est aujourd’hui très porteur, notamment au travers de la consommation hors-domicile, avec des perspectives de croissance à deux chiffres dans les prochaines années », souligne Stéphanie Camus, directrice Business Unit France de la société. Le lancement de la gamme Extra-Ordinary sera, pour le moment ,séquencé en deux phases, prévues pour janvier et septembre 2024. Ainsi, lors de la première, les clients pourront découvrir deux références surgelées sucrées (un pain fourré chocolat noisette à base de chocolat belge et garniture praliné-noisettes au visuel étonnant ainsi qu’une babka caramel sur pâte semi-briochée garnie de caramel salé au sel de Guérande et agrémentée de morceaux de caramel et noix de pécan) et une salée (tresse romarin ail). Ce sera l’inverse en septembre avec deux créations salées (roulé méditerranéen avec tomates, mozzarella, olives noires, poivrons Piquillos, huile d’olive et le carré feta, épinard et ricotta) et une sucrée particulièrement surprenante se rapprochant de la pâtisserie, la goutte poire chocolat. Dans un écrin feuilleté est alors déposée manuellement une demi-poire Williams sur une crème pâtissière onctueuse au chocolat avant d’être, elle-même, saupoudrée de pépites de chocolat… Voilà qui requiert un sacré tour de main !