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Entre inflation, déstructuration des repas et essor du mieux-manger, le marché du snacking est à un tournant

13 Décembre 2023 - 3385 vue(s)
17,4 milliards d’euros cumulés, c’est ce que représenterait selon Xerfi le volume d’affaires cumulé des produits de snacking en France en 2022, tous circuits confondus. Parmi les segments jugés porteurs par le cabinet, les créneaux de l’apéritif et surtout des solutions repas, boostés par la montée du nomadisme alimentaire et l’hybridation des modèles entre distribution et restauration. Les marques devront toutefois s’adapter au contexte économique actuel.

La hausse du nomadisme alimentaire, des foyers de taille plus réduite, la déstructuration des repas et la réduction du temps consacré à la confection des repas ont propulsé le marché des produits du snacking à 17,4 milliards d’euros en 2022 en France, tous circuits confondus (dont 75% entre les mains des GSA), d’après les estimations de Xerfi. Mais les experts s’attendent à ce que celui-ci subisse quelques ralentissements dans les mois à venir, notamment parce que « les marques de snacking vont devoir s’adapter au nouveau contexte économique. Elles ne pourront plus, en effet, compter sur la flambée des prix (+ 20 % en deux ans) pour restaurer leurs marges ». Ainsi l’inflation dans l’alimentaire, qui avait poussé les consommateurs à s’orienter vers des solutions repas moins coûteuses (sandwichs, salades repas et plats préparés individuels), devrait être moins prégnante. On peut donc s’attendre à ce que les prix se stabilisent, voire refluent. « Segment phare du marché avec des ventes proches de 10 milliards en 2023 en GMS, les goûters et encas cèderont du terrain d’ici 2025 pour s’établir à environ 9,3 milliards d’euros », pronostiquent les experts de Xerfi. La croissance des apéritifs (plus de 3 milliards en GMS) pourrait, quant à elle, demeurer modérée grâce aux nouvelles références vendues plus cher. Quant aux solutions repas, elles devraient en revanche bénéficier d’un environnement porteur pour atteindre les 1,3 milliard à l’horizon 2025 après des ventes record en 2022 et 2023 en grandes surfaces. Dans ces conditions, les majors du secteur - des groupes étrangers pour la plupart - ont d’ailleurs commencé à repenser leurs stratégies ou à revoir leur positionnement. Et parallèlement, les marques sont à l’affût de circuits de distribution alternatifs et de nouveaux points de contact avec le consommateur.

Halo sur le sucré

La baisse structurelle des ventes de confiserie de sucre, la disgrâce des produits ultratransformés et trop sucrés mais aussi l’émergence de nouvelles marques de snacking sain sont, de fait, en train de rebattre les cartes du jeu. Xerfi prend l’exemple de Nestlé qui se désengage peu à peu de ses activités de snacking – à l’image de la cession de ses glaces américaines Unis à Froneri en 2023 - pour se recentrer sur les produits « santé » et la nutrition. L’Américain Mars prend, pour sa part, le virage du snacking sain en mettant la main sur plusieurs marques, comme Kevin Natural Foods, et en conservant ses marques historiques. En train de se délester de ses confiseries de sucre (Lajaunie, Stimorol, La Vosgienne et Hollywood), Mondelez a, lui, décidé de se recentrer sur les biscuits. En revanche, l’Italien Ferrero campe sur ses positions dans le snacking et se diversifie sur les biscuits et glaces, rompant avec les stratégies mainstream. « La rationalisation du portefeuille des géants du snacking représentera des opportunités de rachat pour les industriels ou les fonds d’investissement », se projettent les expert Xerfi.

Les industriels à l’affût de circuits alternatifs…

Reste à toucher les consommateurs alors que les produits de snacking sont surtout avalés hors domicile. Ce n’est donc pas le fruit du hasard si les stations-service, distributeurs automatiques, hôtels, discothèques ou zones de transit sont investis par les industriels du marché (Ferrero, Mondelez ou Mars mais aussi Sodebo et Daunat) pour commercialiser leurs snacks. « Le but est bel et bien de recruter de nouveaux consommateurs tant l’accessibilité de l’offre est un enjeu stratégique pour les marques ». Au-delà des GSA, les circuits de distribution alternatifs génèreraient, en effet, plus de 4 milliards d’euros de chiffre d’affaires avec les snacks. Xerfi souligne toutefois que les initiatives récentes n’ont pas toutes été couronnées de succès. Certains ont choisi les bureaux de tabac comme circuit alternatif pour séduire les étudiants et les ouvriers au moment de la pause-déjeuner. La vitrine réfrigérée de Sodebo, avec une dizaine de références de sandwichs ou Pasta Box installée dans une cinquantaine de bureaux de tabac, est toujours en phase de test. Le leader de la pause-déjeuner a aussi décidé d’aller chercher les consommateurs sur leur lieu de travail grâce à la technologie des frigos connectés dans plus de 50 entreprises. « Une bonne idée alors que le marché de la pause déjeuner en entreprise représente plus de trois milliards de repas chaque année ». Certes… Sauf que les industriels se heurtent à la concurrence des acteurs historiques tels que Foodles, Melchior ou Foodchéri. D’autres, encore, ont voulu tenter l’aventure en GMS à l’aide de kiosques dédiés. « Mais à l’exception de LDC qui a relancé l’offensive en prenant le contrôle d’Asia General Food (avec sa franchise Sushi Master), les autres groupes agroalimentaires ont fini par jeter l’éponge », indiquent les conclusions de l’étude. 

… tandis que les distributeurs jouent les restaurateurs

Si la tentation de la restauration ne date pas d’hier pour les distributeurs, les grandes enseignes ont mis les bouchées doubles, ces dernières années, pour reconquérir le terrain perdu face aux offensives de la RHF (restaurants, boulangeries…) qui, avec le développement des services de livraison (Deliveroo, Uber Eats…), est parvenue à casser les barrières entre domicile et hors domicile. « C’est ainsi qu’ont fleuri les espaces de restauration dans les magasins (tables, chaises, micro-ondes…). D’autres distributeurs ont créé des enseignes dédiées à la pause-déjeuner (Dailymonop’, Carrefour Bon App !), voire de véritables restaurants (Carrefour Bon Appétit) ». Des initiatives qui rencontrent, pour l’instant, un succès mitigé. La multiplication des kiosques en concession dans les hypermarchés est une autre voie remarquée par Xerfi. Ces stands exploités par des sociétés tierces (Hana Group, Kelly Deli ou encore Kimoco et Sky Kitchen) ont envahi les trois quarts des hypermarchés Carrefour et sont désormais installés dans les formats de proximité (à l’image des salad’bars Picadeli de Greenfood présents dans de nombreux Franprix). « Pour l’heure, ce modèle serait le plus susceptible de générer du trafic supplémentaire en magasin et d’améliorer l’image qualité des distributeurs ».

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